mercredi 30 juillet 2008

Roman policier-V

Roman trouve une lettre

Tu finiras par la détester et la haïr.
Calcagnini

Ainsi elle était partie. Un mot, sur la table de la cuisine, indiquait qu’elle était retournée chez sa mère, qu’il l’avait trahie, qu’elle se sentait salie, etc. La grande artillerie sentimentale était déballée. Il se demanda combien de temps il lui avait fallu pour écrire cette lettre. Sans doute une bonne partie de la matinée, chaque mot était pesé, mais la lettre était affreusement banale, vide de sens. En plus il y avait une faute d’orthographe. Tous ces petits signes rendaient sa femme méprisable, il n’avait qu’une envie, la chasser de son esprit qu’elle n’ait jamais existé et que cette journée disparaisse complètement.



Où le commissaire décide d’aller chercher la fille du maire, de lui ramener et de passer à autre chose.

Fait-il ton travail ?
Martial

Elle était chez son petit ami ; un grand garçon aux cheveux blonds et aux yeux bleus. Mais au visage couvert d’acné, qu’on ne pouvait plus à son âge appeler de l’acné juvénile. Ses deux incisives proéminentes lui coupaient légèrement la lèvre inférieure. Ce qui lui donnait l’air, non d’un lapin, mais d’un parfait abruti. Il n’aurait plus manqué qu’il zozotât, ou qu’il bafouillât, pour que le portrait physique de ce pauvre-garçon-qui-n’a-pas-de-chance fut complet. Mais chose étonnante, il avait une voix agréable, très douce, aux modulations envoûtantes. Il valait mieux l’avoir au téléphone qu’en face de soi. C’est ce que se disait Roman quand le jeune homme ouvrit la porte, en slip et le t-shirt sale sur le dos, et l’air de sortir du lit, à quinze heures.
Roman entra dans l’appartement, mal entretenu, de garçon célibataire, dont la mère entretient les plus vils instincts, ceux de la fainéantise et de la saleté, car, c’est bien connu, l’homme ne peut par lui-même, ranger et nettoyer, seule une femme en est capable. Roman se dirigea vers la cuisine, enfin le bout de pièce qui sert de cuisine car il y a un four, une plaque électrique et une casserole avec un reste de raviolis collés au fond. Décidément rien ne changeait. La dernière fois qu’il était venu, l’appartement était dans le même état, seules les mouches étaient là en plus aujourd’hui. Il ouvrit la fenêtre et chassa les bestioles vrombissantes pour qu’elles aillent se reproduire à l’extérieur.

— Elle n’est pas là, dit le jeune homme.
— Comment tu sais que je viens pour elle ?
— Tu ne viens jamais ici pour me voir, mais seulement pour la chercher et la ramener à son crétin de père.
— …
— Tu veux un café, un verre d’eau, une bière chaude ?
— Non, merci, rien, ça va, toi ? … Tu ne sais pas où elle est ?
— Aucune idée, depuis la dernière fois où tu l’as ramenée, je ne l’ai pas revue. Deux fois au téléphone, et c’est tout.
— Bon.. Bon … Je ne vais pas te déranger plus longtemps.
— Tu ne me déranges pas, pas du tout même. C’est toujours agréable de te voir.
— Humm
— Et comment va maman ?
— Bien, je pense.
— Comment ça tu penses ? Elle est où ? Enfin barrée ?
— Oui, ce matin. 
— Pas trop tôt. J’ai jamais compris pourquoi elle ne l’avait pas fait plus tôt. Elle est où ? Chez son amant ?
— Ne sois pas désagréable, non plus. Elle est chez sa mère…Ta grand-mère.
— J’avais fait le rapprochement
Et là Roman s’en est voulu, voilà que ça recommençait, qu’il se mettait à faire des lapalissades. Décidément tout partait en vrille. Sa femme. Son fils. Et la fille du maire. Où était-elle ?

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