lundi 14 avril 2008

ANNONCE I



Voici donc le premier message, né de mon annonce.
Si vous cliquez ici vous arrivez sur le message d'origine et ses commentaires, 
et si vous cliquez ici, vous arrivez sur le blog d'où provient ce message.
Voilà c'est aussi simple que ça.
Bonne lecture.


PANTHEON

Oui, je vais vous expliquer comment les choses se passent dans ce cas précis. Un soir où je rentre chez moi, certainement pas pour aller écluser quelques verres chez Belane non, je rentre vraiment chez moi. Mon paquet de Gauloises Disque Bleu est contre mon coeur & j'en extirpe une cigarette que j'allume. Il se pourrait qu'il soit deux heures du matin mais franchement ça n'est pas très important. Il fait nuit. Il fait noir, c'est tout ce qui compte. Dites vous bien que pour rentrer chez moi il faut que je roule une bonne dizaine de minutes en remontant une partie de la vallée vitres baissées, alors qu'il doit bien faire dans les -2°, tout ça pour que la fumée de ma Gauloise ne reste pas dans l'habitacle. Gauloise Disque Bleu qui sont les mêmes cigarettes que fumait Ravel. J'aime bien ce genre de clin d'oeil insignifiant. Ce sont de belles cigarettes à l'ancienne, un peu comme celles que fume Belmondo dans A Bout de Souffle qui est un film que j'adore. Elles sont toutes blanches. Même le filtre est blanc & ça tombe bien parce que en pleine nuit noire les montagnes autour de moi sont toutes blanches aussi. La lune est pratiquement pleine, tellement pleine qu'elle fait briller toute la neige comme un mégaspot cosmiqueBREF! Tout est... blanc quoi. Ca me rappelle les soirs de biture où avec Belane on allait fumer des joints aux Goudes faces aux îles & pour un peu, mais vous savez comme moi que Lazare est d'une correction à toute épreuve, j'en chialerais de nostalgie. J'aime la nostalgie/mélancolie comme j'aime l'alcool, le tabac & mes amis. C'est un fait.
Je roule donc & tout ceci est assez tripant, d'autant plus tripant que j'ai mis dans le lecteur de la voiture un disque de Biosphere & par n'importe lequel. Comme un de ces clins d'oeil insignifiants que j'affectionne tout particulièrement il s'agit d'Insomnia. Je roule en pleine nuit, nuit moitié-noire moitié-blanche, par -2° sur les sons organiques, quasi cardiaques, d'Insomnia le bien nommé &, sans que je sache pourquoi, je me demande quelle pourrait bien être la liste de mes 5 livres préférés de tous les Temps en entier de l'Univers intégral.

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Va comprendre comment ce genre de connerie peut bien se frayer un chemin dans ton cerveau en pleine nuit bicolore... Quoiqu'il en soit je commence à y réfléchir sérieusement & vous pouvez bien imaginez que voilà une mission assez singulière que se voit infliger Lazare en pleine courbe glissante au sortir du hameau des Guibertes, qui compte trois quatre maisons, une ferme & la fabrique de génépi qui innonde toute la vallée ainsi que les gosiers de milliers d'européens en vacances. Ma cigarette est presque consommée. Dans ces cas là (tout le monde s'est déjà posé cette question ou se l'ai vu posée par quelqu'un d'autre) on essaie toujours de faire bonne figure & je dois avouer que j'ai failli répondre Ulysse de Joyce rien que pour épater l'arrêt de bus de la ligne TransAlpes qui dormait à la sortie des Guibertes. Il est évident qu'Ulysse est un livre qui m'a bouleversé, intrigué. Fatigué aussi... oui oui & même bien fatigué. La fin du monologue de Madame m'a laissé sur les genoux. J'ai toujours adoré les irlandais pour une quantité biblique de raisons, entre autres parce qu'ils sont catholiques comme moi & ça fait bien la nique aux anglais, ensuite j'adore le vert & la bière & puis ce sont de sacrés conteurs y'a pas à tortiller (Sterne! Shaw! Swift! McLiam Wilson! Cavanagh! Glisco! Qui ça? Glisco, le demi de mêlée de l'équipe de Cornach...). L'arrêt de bus étant derrière moi je profitai d'une belle ligne droite assez bien déneigée pour m'allumer une deuxième cigarette & être un poil plus honnête & me rendre compte que deux catégories bien distinctes de livres avaient marqué mon parcours de lecteur dilettante & flemmard, il faut bien l'avouer. Il y a tout d'abord ces livres pour lesquels j'éprouve une affection véritable & indéfectible sans que ceux ci soient, à proprement parler, des classiques de la littérature universelle. Ainsi des trucs (sic) du genre Demande à la Poussière (Mikaël ne te fâche pas), Le Dernier Baiser de Crumley, La Mort & la Belle Vie de Richard Hugo, le Glamorama de Bret Easton Ellis qui, j'en suis sûr, sera un classique de la littérature américaine & tant pis pour ceux qui ne sont pas d'accord. Rippley Bogle. J'y mettrait aussi Les Quatre Brigands de Gu Long que j'ai lu comme quelqu'un qui lit Les Quatre Mousquetaires pour la première fois & puisqu'on cause littérature asiatique je vois pas pourquoi La Parfaite Lumière de Yoshikawa n'y serait pas non plus. Eh ouais. Je pense aussi à Gaiman que j'aime beaucoup & surtout à American Gods qui est un livre fantastique dans tous les sens du terme, au coup de poing que fut pour moi Aucune Bête Aussi Féroce & à l'inexplicable Libidissi de Klein qui me laissa songeur une semaine après l'avoir lu. Que dire du premier livre de Safran Foer, Tout Est Illuminé, à part peut être que c'est là un des meilleurs livres publiés ces dernières années? Je n'en sais trop rien.
La ligne droite est vite passée & je pénètre dans la partie boisée qui débouchera sur l'entrée de mon village, à moins que mes réflexions ne me précipitent contre un sapin... en même temps, si j'écris ces mots c'est que rien de grave ne s'est produit, n'est ce pas?
La deuxième catégorie dont je parlais plus haut surgit comme un plat de résistance, & moi qui adore la bonne bouffe, j'en suis tout content. Cette deuxième colonne militaire concerne les livres dont la dimension & l'ambition littéraire sont sans comparaison aucune. Du moins à mes yeux. La subjectivité dans ce domaine est un sacré merdier c'est bien vrai. Quoiqu'il en soit, quand je pense au premier livre de cette catégorie, au moment très précis où ma deuxième cigarette s'éteint & que je me pose la question de savoir si une troisième ne serait pas de la pure gourmandise cancérigène, un seul livre apparaît: Les Reconnaissances de Gaddis &, ma foi, je pourrai bien arrêter cette liste là, stopper le moteur & finir le chemin à pieds tant ce livre m'apparaît comme définitif dans de telles circonstances. Oh! mais je suis joueur, & je n'ai certainement pas envie de rentrer à papattes alors j'invoque tout ce que j'ai pu lire de super ambitieux & si Ulysse arrive avec ses gros sabots je le pousse sans aménité pour faire place à d'autres. Qui ça? Eh bien à Elias Canetti par exemple. Comment ne pas faire entrer Auto-da-Fé dans mon Panthéon? Ça serait vraiment stupide de ma part alors que j'amorce un superbe virage à 120 km/h. Mes origines napolitaines me supplient de ne pas les oublier & voilà que Moravia rapplique. Tout Moravia, mais peut être que ma préférence va vers Le Conformiste. C'est plutôt un bon choix. Puis je me suis aperçu que j'avais souvent pratiqué la lecture de façon géographique. Ouais, c'est n'importe quoi je sais mais j'ai eu ma période empire austro-hongrois germano-bohémienne (Canetti donc, Martin Buber aussi, puis Alexanderplatz de Döblin, Sens Unique de Walter Benjamin, Transit de Seghers, Les Mutilés de Ungar, L'Autre Côté d'Alfred Kubin, Otto Weininger, Tout Kafka, Epépé de Karinthy & d'autres dont j'ai oubliés les noms), ma période russe (Dostoïevski, Gogol beaucoup, Petersbourg de Biely en ce moment même sur le grill bruyantissime), ma période sud-américaine (En commençant par papa Borgès mais j'ai vite préféré Héros & Tombes de Sabato & surtout l'oeuvre entière de Bioy Casares & quelques incursions chez Onetti (Lorsque Plus Rien N'Aura d'Importance, La Vie Brève) & Cortazar & puis surtout Bolaño Les Détectives Sauvages, Etoile Distante & dans quelques temps 2666. Enfin je ne peux pas ignorer Rulfo & son Pedro PàramoAh! & quid de Cesar Aira? De Paùls? De Volpi?). Pour les français, c'est un peu comme la musique: j'ai du mal à les aimer. Il y a bien Flaubert dont le style reste un exemple sans comparaison possible ( St Antoine, un livre complètement funky) & je me dis aussi que si Giono avait été un auteur plus urbain que ça je lui aurait certainement voué une sorte de culte (si Un Roi Sans Divertissement s'était déroulé à Paris ou dans une grande capitale Giono aurait été une super star, plus fort que Sébastien Tellier, ça fait pas un pli) & que si Genet n'avait pas autant été... enfin vous voyez ce que je veux dire, Notre-Dame des Fleurs c'est énooorme mais à un moment... ATTENTION je n'ai rien contre ce genre... ouais & rien que de dire ça... les quéquettes par ci par là...BREF! Pour le reste... Chevillard n'est pas encore mort que je sache & je crois que personne n'arrivera à la cheville de Gracq avant un bon moment tandis que je ne souhaite à quiconque d'être comme Céline, même si c'étaitEST TOUJOURSle meilleur. C'est bien dommage en tout cas____Ohlala! un lapin blanc vient de filer juste sous mes roues. C'était moins une avant queCOUIC! Mais tout va pour le mieux sur cette départementale immaculée conceptioneigée, si bien que je repense à ma période métagéographique, SF, avec des livres immenses qui dépassent largement la petite étagère SF/Fantasy dans laquelle on les a parqué. Je me souviens très bien que la lecture de L'Oreille Interne de Robert Silverberg m'a totalement pétrifié d'admiration (Antonio, où as tu rangé ce livre dans ta belle librairie? Mikaël?), La main Gauche de la Nuit d'Ursula Le Guin itou & l'incroyable Quatuor de Jérusalem de Whittemore que tous les lecteurs de Pynchon ne pourraient qu'apprécier (Antonio comment parles tu de ce livre lorsque tu le conseilles à un client?)...
Ça fait déjà pas mal de pages tout ça, sans compter avec la zone géographique qui m'a donné le plus de plaisir & d'émotions dans mes lectures: la bonne vieille Amérique à Bibi. Alors que je rentre en trombe dans Le Monêtier me revient tous ces livres que je chéris plus que tout & en premier Sur La Route de Kerouac, Le Festin Nu, les livres de Brautigan, l'univers d'Harrison, Pynchon bien sûr & aussi La Conjuration des Imbéciles de Kennedy Toole & aussi les premiers bouquins de Paul Auster, & puis de Philip Roth (surtout La Contre-Vie), & encore Herzog de Saul Bellow parce que j'ai les mêmes manies que lui, Déjà Mort de Denis Johnson quand j'ai lu sur la quatrième les mots « David » & « Lynch », Inversion de Brian Evenson parce que j'ai toujours aimé les mormons rock'n'roll, La Famille Royale de Vollmann parce qu'à mon avis c'est le plus grand roman américain publié ces 10 dernières années... Mais, Oh le joli « Mais » que voili que voilou, mais si il ne devait en rester qu'un, un seul, ça ne serait pas Duncan McLeod non, il serait britannique oui, alcoolique comme Bibi, fan de mezcal & de lunettes de soleil classe type Persol Dolce50, profondément touchant. Si il ne devait rester qu'un seul livre dans ma bibliothèque ça serait Sous Le Volcan de Lowry. Ça fait pas un pli mes loulous. En me garant sous le clocher de l'église j'étais bien contant d'être rentré vivant de ce voyage sans avoir plongé dans une barrancà & de me dire que mon classement des 5 meilleurs livres de tous les Temps en entier de l'Univers intégral avait un déjà un vainqueur définitif.
Eh ouais, vous pouvez me croire sur parole, on dort mieux comme ça...

2 commentaires:

Gwen a dit…

Vraiment une belle idée, cette exhumation des billets anciens.. Un peu comme ouvrir une malle dans le grenier d'une maison où plein de gens vivent.

polo a dit…

Votre blog est très intéressant et je trouve que de prendre le parti d'impliquer d'autres textes que les votres est un choix judicieux et courageux. Celui ci est très bon.
A vous relire.
Polo