Elégamment vêtu, fumant ses cigarettes avec désinvolture, plus pour s’entourer d’un écran de fumée blanche que par besoin de nicotine ; ainsi il apparaissait.
C’est en s’habillant de neuf et en assurant le maintien de la netteté irréprochable de son vêtement qu’il entrait peu à peu dans l’état stationnaire.
Il s’asseyait et nous regardait fixement de ses yeux très noirs, trop noirs. Puis il parlait beaucoup et bougeait tout autant. Parler et bouger. Cela allait ensemble pour lui. Accompagner la parole de gestes ; accompagner les gestes de la parole.
Il était à la recherche des gestes qui donnent un jour les phrases.
La montre à son poignet, élégante comme tout ce qu’il portait, indiquait toujours la même heure : cinq heures et deux minutes.
Un héros : celui à qui on fait du tort et celui qui ne cède jamais. (Lacan)
Sur une des rares photographies de lui on le voit avec deux chats, des chatons. Elle me dit : « J’en veux un comme ça, comme celui qu’il a dans la main. »
Prier les grands esprits de Gombrowicz et de Thomas Bernhard, de Bossuet, Dostoïevski et de Franz Kafka, de Shakespeare, Laclos et Nabokov.
Etre un ennemi fuyant.
L’omission, le retrait, la désaffection ou le mimétisme tactique que l’on rencontre chez certaines espèces animales fourbissent davantage ses armes ; la figure du maquisard le hante mieux que celle du général.
Ce qu’il écrivait et sa façon de l’écrire l’ont mené au Grand Siècle. Non l’inverse.
A chacune de ses paroles on pressentait la mort qui se rapprochait : et le coup de fusil qui devait l’aider à finir ses jours, ne fut pour personne une surprise. De ce suicide murement réfléchi, il n’y avait pas grand chose à en dire, ou peut être si, une chose : enfin.
Regarder un tableau, une photographie comme on regarde la mort : dans les yeux, avec un léger sourire.
Cinq heures et deux minutes : l’heure de sa mort ? l’heure de sa naissance ?
Nouer chaque jour, impeccablement, sa cravate et avoir pour maxime : pas un jour sans cravate.
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